Eugène SCHNEIDER et le projet NOBEL de dynamite - 1869

 

Eugène Schneider - 1867

 

A la fin du Second Empire, Alfred Nobel tente, avec le maître de forges lorrain Paul Barbe, de procéder à l’introduction de la dynamite en France. La difficulté réside alors dans l’existence du monopole d’état sur les poudres, qui interdit toute fabrication et commerce de la nouvelle substance sur le sol français. La situation apparaît toutefois en cours de changement en Europe : dans une lettre adressée en 1869 à P. Barbe, l’inventeur de la dynamite fait part des modifications survenues en peu de temps dans la législation autrichienne. La rapidité de ces changements le conforte dès lors dans la validité du projet français et dans la stratégie à adopter.

Au terme de sa lettre, Nobel suggère l’idée d’intéresser à ce projet l'industriel Eugène Schneider (1805-1875). Egalement d’origine lorraine, ce maître de forges est de fait l’une des grandes figures économiques et politiques de son temps. Promoteur de l’industrie minière et métallurgique du Creusot, ce proche de Napoléon III est à la fois régent de la Banque de France et depuis 1867, président du Corps législatif. Dès les origines, le projet de la dynamite impose ainsi le recours à un réseau politique et relationnel influent. C'est toutefois sous le gouvernement Gambetta et lors de la guerre franco-prussienne qu'est fondée en 1870 la dynamiterie de Paulilles.

E. PRACA

 

DOCUMENT

Lettre d’Alfred Nobel à Paul Barbe

24 octobre 1869

 

Monsieur Fr. Barbe

Liverdun

 

Mes idées quant à la Dynamite pour la France se sont beaucoup changées depuis notre entrevue à Cologne, et voici pourquoi.

En Autriche comme en France nous avions à lutter contre le monopole et contre mille préjugés et formalités. Or depuis trois mois seulement nous avons, par nos agents à Vienne, entamé cette lutte et déjà le Gouvnt d’Autriche vient d’autoriser le transport de Dynamite par chemin de fer, l’abolition du monopole et la réduction du droit d’entrée (l’introduction nécessitait en outre une autorisation spéciale) de 260 à 5 fls les 55 kilos.

Ce qui est possible en Autriche l’est en France, et croyez-moi, travaillons-y sérieusement, sans causer d’outrage, par de petits établissements basés sur la tolérance.

Un homme qu’il faudrait y intéresser ce serait Mr Schneider.

Votre dévoué

A. Nobel

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SOURCES

Archives Nationales de Suède, Stockholm, correspondance Alfred Nobel.

POUR EN SAVOIR PLUS

Sur la dynastie Schneider :

DE LA BROISE Tristan, TORRES Félix, Schneider l'histoire en force, éd. Jean-Pierre de Monza, 1996.

Sur Paul Barbe :

PRACA E., Paul Barbe - Notice de la Société des Ingénieurs civils - 1890, Site Amis de Paulilles, rubrique Administration/Patronat.