Consignes générales de la dynamiterie de Paulilles vers 1956

 

A l’exemple de celles formulées en 1926, les consignes générales de la dynamiterie de Paulilles fixent vers 1956 le comportement général à observer au sein de l’établissement. Elles débutent par le dépôt des objets à risques à laisser à la guérite, devant l’entrée du site dynamitier, se poursuivent par la tenue vestimentaire à revêtir par le personnel et rappellent, sur la vaste étendue du territoire industriel, que l’itinéraire le plus court doit être adopté pour rejoindre son poste.

Sont ensuite énoncées les consignes internes de sécurité au travail : comportements à tenir en cas de dysfonctionnement d’un appareil, et notamment mesures de protection contre l’incendie. Une large part du document est consacrée aux règlements régissant l’entretien et la réparation des machines : formalités à accomplir au sein des bureaux, protection des machines et du personnel, mise à disposition de l’atelier à dépanner. Le document éclaire en ce sens les pratiques quotidiennes applicables au sein de l’entreprise.

Au plan sanitaire et social, la consigne mentionne par ailleurs l’autorisation de circulation accordée aux instances représentatives des travailleurs : représentants et délégués du personnel, comité d’hygiène et de sécurité, comité d’établissement. A noter enfin l’interdiction faite au personnel d’emporter des substances explosives ou leur composant, signe de l’existence de cette pratique destinée à réduire, hors du temps de travail, les symptômes de sevrage liés aux ingrédients toxiques de fabrication.

E. PRACA

 

DOCUMENT

Consignes générales de la dynamiterie

 

Article 1 - Avant de franchir l'enceinte de la Dynamiterie, le personnel doit laisser à la guérite, devant l'entrée, les allumettes, briquets, articles de fumeurs et tous autres objets pouvant entraîner par leur présence dans les explosifs, un danger pour l'usine ou pour les utilisateurs des produits fabriqués..

De toute façon sont seuls autorisés dans les vêtements de travail les mouchoirs de poche, portefeuilles et les clés de l’armoire du vestiaire. Les montres seront tolérées dans les ateliers d'encartouchage ou d’emballage à condition d'être posées sur l'étagère la plus éloignée des machines et des explosifs. Des fouilles pourront être effectuées et des sanctions seront prises si d'autres objets sont découverts.

Avant de gagner son lieu de travail, le personnel doit passer par les vestiaires pour revêtir les vêtements et chausser les chaussures de travail fournis par la Société.

Article 2 - Les combinaisons et blouses de travail seront périodiquement échangées afin de permettre leur nettoyage par la Société.

Article 3 - Pendant le travail, le personnel doit utiliser exclusivement des chaussures fournies par la Société ; il ne doit en aucun cas les modifier ; en particulier le collage ou clouage de ferrures est formellement interdit.

Article 4 - Il est interdit au personnel d'emporter des substances explosives ou leur composant, des chaussures et vêtements de travail et d'une façon générale tous biens appartenant à la Société.

Article 5 - Chaque membre du personnel doit se rendre à son emplacement de travail par l'itinéraire le plus court. Sous réserve de consignes particulières de sécurité, cette interdiction ne s'applique pas aux Représentants du personnel, au Comité d'Hygiène et de Sécurité et au Comité d'Etablissement ni aux délégués du Personnel dans les limites qui leur sont confiées par les prescriptions législatives ou réglementaires.

Cependant, aucun membre du personnel ne peut quitter son travail sans prévenir son contremaître, et se rendre dans un autre atelier sans se présenter d'abord au contremaître dont dépend cet atelier.

Article 6 - Les ateliers doivent être maintenus dans un état de propreté rigoureuse. Le sol, les parois intérieures et les appareils feront l'objet d'un nettoyage journalier.

En outre, toute substance explosive tombant à terre sera balayée et mise dans une boîte spéciale avec les résidus à brûler.

Article 7 - En cas de fonctionnement anormal d'un appareil, le conducteur doit l'arrêter, couper le courant, évacuer l'atelier, faire chercher le contremaître et, en attendant, assurer lui-même avec un autre ouvrier la garde des issues à l’extérieur des merlons.

Article 8 - La protection contre l'incendie est assurée :

a) - par un seau plein d’eau placé à proximité de chaque atelier

b) - par des extincteurs à mousse

c) - par des bouches d'incendie équipées sur le pourtour et à l'intérieur de la Dynamiterie.

Tout membre du Personnel ayant aperçu un début d'incendie et n’ayant pu l’éteindre avec les seaux ou les extincteurs se trouvant à proximité, doit immédiatement donner l'alarme, faire évacuer les ateliers voisins et prévenir le contremaître de toute urgence ; celui-ci téléphonera immédiatement à la Centrale et à la Consigne de l'usine pour faire donner le signal d'incendie (3 coups de sirène espacés) ; il fera prévenir la Direction et prendra toutes mesures utiles pour lutter contre l'incendie en sauvegardant la sécurité du personnel.

Article 9 - En cas d'orage à proximité immédiate de l'usine, les contremaîtres doivent faire arrêter le travail et évacuer le personnel dans les vestiaires. Des consignes particulières sont prévues pour la nitration et le filtrage.

Article 10 - L’intervention des ouvriers d'entretien à l’intérieur de la Dynamiterie est régie par les consignes suivantes :

Consignes pour l'entretien et la réparation des machines et appareils :

Si le contremaître estime que la remise en état de ces appareils nécessite l'intervention des ouvriers d'entretien, qu'il s'agisse d'un réglage, d'une réparation, d’une révision ou d'un travail aux abords immédiats de l'atelier, cette intervention ne pourra se faire qu'en observant strictement les règlements ci-dessous :

1°) Avant toute intervention de l'entretien et tout démontage, l'atelier sera débarrassé de tout explosif en vrac ou encartouché. Si le contremaître juge que l'intervention est de faible importance et ne porte pas sur les organes de la machine en contact avec l’explosif, il fait recouvrir ce dernier du dispositif amovible de protection prévue. Dans le cas contraire, la machine est entièrement débarrassée de la dynamite qu'elle contient et doit se trouver dans un état de propreté compatible avec la sécurité. Le minimum de personnel doit assurer ce nettoyage.

2°) Une pancarte est alors apposée sur chacune des portes : « Ateliers consignés en réparation ».

3°) Le contremaître établit le bon de réparation, convoque l'entretien soit en lui faisant envoyer le bon, soit par téléphone, et remplit les 4 premières colonnes du cahier de dépannage et d'entretien, il appose son visa dans la 5e colonne, ce qui indique que l'entretien peut disposer de l'atelier.

4°) Le mécanicien d'entretien, envoyé par l'atelier, doit se rendre en premier lieu au bureau de la Dynamiterie, où se trouve le cahier et apposer son visa dans la 7e colonne après avoir vérifié que le visa du contremaître lui assure la mise à disposition de la machine après nettoyage. Il se rend alors à l'atelier en question.

5°) Lorsque la réparation est terminée, il revient au bureau de la Dynamiterie et appose un nouveau un nouveau visa dans la 8e colonne, ce qui libère l'atelier et le rend à la fabrication, la remise en route ne pouvant avoir lieu si ce visa n'est pas donné.

6°) Même si le mécanicien est rappelé peu de temps après par le même atelier, il devra à nouveau effectuer les mêmes formalités.

7°) Tout travail nécessitant l'emploi d'un chalumeau ou tout autre appareil à flamme à l'intérieur de l'enceinte de la Dynamiterie, ne pourra être exécuté qu'après l'ordre écrit du Chef de Fabrication ou du Directeur de l'Usine.

8°) Durant tous les travaux de l'entretien, l'atelier reste soumis à la surveillance du contremaître de fabrication dont il dépend.

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SOURCES

« Consignes générales de la dynamiterie », 3 p. dactylographiées, sd : v. 1956. Archives privées.

POUR EN SAVOIR PLUS

PRACA Edwige, Consignes générales de la dynamiterie de Paulilles en 1926, Site Amis de Paulilles, Rubrique Protection sociale.