Andrée BARBE et Claude FORESTIER - Premier mariage - 1882

 

Aix-les-Bains - Stèle dédiée au baron et général d'Empire F.-L. Forestier

 

Née en 1865 à Liverdun (Meurthe et Moselle), Andrée Barbe, fille cadette de Paul Barbe, promoteur de la dynamite en France, épouse en 1882 Claude Forestier, fils de notaire, issu de la haute bourgeoise d’Aix-les Bains (Savoie). A l’instar de ses deux sœurs qui contractent des alliances parmi les cadres de l’armée, le choix de ce conjoint n’apparaît pas anodin. Claude Forestier est en effet le petit-neveu de deux célèbres généraux et barons d’Empire, tous deux volontaires en 1792, vainqueurs des Espagnols à la tour de la Massane et sur les crêtes des Albères. Par une circonstance heureuse, la dynamiterie de Paulilles a été fondée en 1870 par Alfred Nobel et Paul Barbe, au pied de ce massif, dans les Pyrénées-Orientales[1].

Claude Forestier - Administrateur de sociétés industrielles

 

Mines d'or du Châtelet - Vue partielle

 

Plus précisément, Claude Forestier (1853-1937)[2] est le fils aîné de Marie Fontaine et de Pierre-Gaspard Forestier[3], notaire à Aix-les-Bains. Sa carrière bénéficie de la nomination de Paul Barbe au poste de ministre de l’Agriculture, fonction que celui-ci exerce du 30 mai au 12 décembre 1887. Jeune avocat devenu chef de cabinet du préfet du Nord (1882),  sous-préfet de Gex (Ain - 1883), puis sous-préfet de Clamecy (Nièvre) fin 1885, le gendre de Paul Barbe est de fait nommé, après sa mise en disponibilité, chef de cabinet du ministre[4].

Bien que ce ministère soit de courte durée, et malgré le décès de Paul Barbe en 1890 et le divorce d’avec Andrée Barbe en 1893, Claude Forestier occupe désormais des fonctions dans le secteur industriel, à commencer par l’administration des sociétés Nobel.

Administrateur puis administrateur délégué de la Société des Matières Plastiques (SMP) fondée en 1889, il devient à ce titre administrateur de la Société Centrale de Dynamite[5]. Il demeure administrateur de la nouvelle Société industrielle pour les Matières Plastiques (SIMP) créée en 1924[6], puis administrateur de la Société Nobel Française[7] jusqu’à son décès en 1937[8]. Au tournant des années 1930, il est également administrateur de la société L’Arandonaise (Isère), et participe à la fondation de la Société  Ultraphone Française, dépendant à Paris du groupe Nobel[9].

Parmi les sociétés de métaux fins, Claude Forestier est administrateur fondateur de la société des Mines de El Galayo, créée au Portugal en 1892 avec la participation d’actionnaires Nobel[10]. En France, il est administrateur de la Société des Mines d’or du Châtelet constituée en 1907 - exploitation en Limousin[11] - puis président de la Société des mines d’or de la Marche, dont l’exploitation intervient également dans l’arrondissement de Limoges (Vienne)[12]. Dans les années 1920, il administre également la Société Alsacienne de Produits Chimiques dont les usines sont situées à Mulhouse et La Rochelle.

En définitive, Claude Forestier apparaît administrateur de sociétés de dynamite, de matières plastiques et autres produits chimiques ainsi que de métaux fins. Domicilié à Paris, décédé à Belfort, il est inhumé en 1937 dans sa ville natale à laquelle il était attaché[13]. A son nom doit être associé celui de son frère cadet, Jean Claude Forestier, dont la carrière parisienne, de nature différente, débute également en 1887.

Jean-Claude Forestier - Conservateur des promenades de Paris

 

 Article de J.C.N. Forestier - 1913

 

Le parcours de Jean-Claude Nicolas Forestier (1861-1930)[14] diverge de celui de son frère, mais a probablement une origine commune liée au parcours du Lorrain Paul Barbe[15]. Initialement formé à l’école polytechnique[16], J.C.N. Forestier étudie en effet de 1883 à 1885 à l’importante Ecole Forestière de Nancy. Fonctionnaire de la Ville de Paris de 1887 à 1927, entré au service autonome des promenades de la ville de Paris en 1887[17], il est conservateur du bois de Vincennes (1889)[18], du bois de Boulogne et du secteur ouest des Promenades de Paris (1898). Connu pour son goût des parcs et jardins, il apparaît également comme urbaniste.

Selon sa notice biographique, «  Il aménage l'avenue de Breteuil (1898), sauve le Champ de Mars (1904) et participe à la réflexion sur l'aménagement des fortifications à partir de 1905. Le sauvetage du domaine de Bagatelle, "folie" du XVIIIe siècle, la recréation de son jardin (1904-1908) et la parution de l'ouvrage Grandes Villes et systèmes de parcs en 1906 le propulsent au devant de la scène ». A l’étranger, Jean Claude Forestier « aménage un ensemble de jardins à Séville et remodèle à partir de 1915 la colline de Montjuïc à Barcelone », dont les archives photographiques sont conservées. Il travaille également pour le protectorat du Maroc, les villes de Buenos Aires, La Havane et Lisbonne[19] .

En tout état de cause, officier de la Légion d’honneur, commandeur du mérite civil d’Espagne, Jean-Claude Forestier achève sa carrière comme conservateur en chef des promenades de Paris, vice-président de la Société française des Urbanistes, président de la Ligue urbaine, vice-président de la Société des amateurs de jardins. Décédé à Paris en 1930, il est également inhumé à Aix les Bains, sa ville natale[20].

Une extension de réseau

En définitive, les deux frères Forestier participent de la société de la Belle Epoque dont l’émergence date de l'après-guerre de 1870 et dont un réseau d’alliances se constitue à partir de l’ascension sociale de Paul Barbe, associé d’Alfred Nobel dans la promotion de la dynamite. A ces réseaux familiaux et ces parcours individuels, à la fois financiers et esthétiques, s’ajoute encore celui d’Andrée Barbe, divorcée de Claude Forestier en 1893. Intégrant le milieu artistique, celle-ci épouse en effet en 1905 à Monaco, le peintre et dessinateur André Sinet.

E. PRACA

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SOURCES

Archives des Hauts de Seine - Neuilly-sur-Seine : mariage Forestier/Barbe.

BIOGRAPHIES EN LIEN
 
Sur les ancêtres de Claude Forestier, défenseurs des Pyrénées-Orientales : 
Wikipédia : Gaspard François Forestier (1767-1832) : Tour de la Massane, Fort Saint-Elme.
Wikipédia : François-Louis Forestier (1776-1814) : Campredon.
 
Sur Jean-Claude Forestier et l'art des jardins :
Cité de l’Architecture et du Patrimoine : Notice Jean-Claude-Nicolas Forestier.
 
POUR EN SAVOIR PLUS
 
PRACA E., Claude FORESTIER - 1853-1937 – Disques et Dynamite,  site Amis de Paulilles, rubrique Productions.
PRACA E., Marguerite BARBE et Ernest DUPUY - Premier mariage - 1878, site Amis de Paulilles, rubrique Administration/Patronat.
PRACA E., Marguerite BARBE et Samuel Serge VORONOFF - Mariage - 1896, site Amis de Paulilles, rubrique Administration/Patronat.
PRACA E., Pauline BARBE et Eugène Sylvestre BUISSON D’ARMANDY - Mariage - 1878, site Amis de Paulilles, rubrique Administration/Patronat.
 

 

NOTES

[1] Gaspard François Forestier (1767-1832), né le 14-3-1767 à Aix, décédé à Paris le 24-4-1932, LH/997/95. François Louis Forestier (1776-1814), né le 3-3-1776 à Aix, décédé début 1814, LH et articles Wikipédia. Tous deux sans descendance.

[2] Claudius Eugène Forestier, né le 17-2-1853 à Aix les Bains, décédé le 2-4-1937 à Belfort.

[3] Pierre-Gaspard Forestier : né le 23-7-1807, décédé en avril 1864. Notice nécrologique : Courrier des Alpes, 23-4-1864. De son union avec Marie Fontaine sont issus 3 enfants : Claudius Eugène (1853-1937), Marie, et Jean Claude Nicolas (1861-1930).

[4] Le Matin, 2-6-1887 : « M. Claudius Forestier, gendre de M. Barbe, ancien sous-préfet de Clamecy est, ainsi que nous l’avons déjà annoncé, nommé chef de cabinet du ministre de l’Agriculture ». Mis en disponibilité par décret du 5-3-1887.

[5] GALLIOT Armand, 75 ans d’activité d’un holding. La Société Centrale de Dynamite. 1887-1962, p.50.

[6] GALLIOT Armand, p.54 et 55.

[7] GALLIOT Armand p.57. Nobel Française est issue de la fusion de la SIMP avec la Société Générale pour la Fabrication de la Dynamite, propriétaire des dynamiteries de Paulilles et d’Ablon.

[8] Journal Le Temps, 4-4-1937.

[9] PRACA E. : Claude Forestier -1853-1937 - Disques et dynamite, site Amis de Paulilles, rubrique Productions.

[10] Paris-Capital, 21-9-1892. Mines de plomb et de zinc argentifère situées dans la province de Séville. Les administrateurs issus du groupe Nobel sont Jules Chaubet, André Mialane et Claudius Forestier.

[11] Les Assemblées Générales, 4-7-1912. La société est présidée par Albert Laurans.

[12] JO des 16-11-1928 et 24-7-1929. Cette société de recherches aurifères obtient un permis d’exploitation sur les communes de St Laurent les Eglises et Ambazac (Vienne). Sur la société alsacienne : Annuaire Industriel, Répertoire général de la Production française, 1925, ED2, vol. 1, partie 2.

[13] Journal des Débats, 9-6-1892. Claude Forestier est présent à l’inauguration du chemin de fer à crémaillère d’Aix les Bains au Mont Revard (1550 m.) aux côtés de Jules Roche, ministre du commerce, du préfet et du maire.

[14] Jean Claude Nicolas Forestier : né le 9-1-1861 à Aix les Bains, décédé le 26-10-1930 selon Wikipédia, dernière date à vérifier, le journal Le Temps du 30-10-1930, le donnant décédé la veille. Connu sous les prénoms de Jean ou Jean-Claude Forestier.

[15] Paul Barbe (1836-1890), polytechnicien, est originaire de Nancy. Sa fille cadette Andrée Léonie Alexandrine Barbe, naît en 1865 à Liverdun, où il est propriétaire de hauts-fourneaux.

[16] Le Temps, 1-10-1880. Admis au concours Polytechnique, année 1880, sous le n°182.

[17] Wikipédia : il intègre le service autonome des promenades et plantations de la ville de Paris en 1887, (c’est-à-dire l’année d’accession de Paul Barbe au ministère de l’Agriculture), et y demeure jusqu’à son décès.

[18] Bulletin municipal officiel de la ville de Paris, 13-4-1889.

[19] Notice Jean-Claude-Nicolas Forestier, mise en ligne sur Cité de l’Architecture et du Patrimoine, d'après MIDANT Jean-Paul, notice Forestier dans Dictionnaire de l'architecture du XXe siècle. Paris: Hazan, IFA, 1996 ; également jalons sur Wikipédia.

[20] Journal Le Temps, 30-10-1930, annonce décès; également Le Figaro. De son mariage avec Berthe Sellier est née Pierrette  Forestier (1902-1932) x en 1925 à Alexis-Paul Bourgeois (°1897), architecte, d’où Michel Bourgeois. Sur ses droits à la retraite : Bulletin Municipal Ville de Paris, 22-7-1927 et JO 21-4-1928.